Le Mali demande le «retrait sans délai» de la Minusma, la mission de l’ONU dans le pays

Le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop, a demandé ce vendredi 16 juin 2023 devant le Conseil de sécurité de l’ONU le « retrait sans délai » de la mission des Nations unies dans son pays, la Minusma, dont il a dénoncé « l’échec » pour répondre au défi sécuritaire. L’annonce d’Abdoulaye Diop semble avoir pris de court certains membres du Conseil.

Il se chuchotait que le Mali allait faire une sortie importante aujourd’hui dans la salle du Conseil, mais seuls les membres permanents semblaient avoir imaginé cette issue : la demande de retrait immédiat de la Minusma, alors que les autorités de transition semblaient tenir à cette force il y a encore quelques mois et que les négociations du renouvellement de mandat doivent se dérouler ces deux prochaines semaines. Même s’il y avait des signes avant-coureurs, rappelle Jean-Hervé Jézéquel, directeur de projet Sahel à l’International Crisis Group, cette annonce a tout de même été une surprise.
Abdoulaye Diop a expliqué qu’après presque dix ans sur le terrain, le travail de la Minusma était un échec. « La Minusma semble devenir partie du problème en alimentant les tensions communautaires exacerbées par des allégations d’une extrême gravité et qui sont fortement préjudiciables à la paix, à la réconciliation et à la cohésion nationale du Mali », a-t-il estimé. « Cette situation engendre un sentiment de méfiance des populations à l’égard de la Minusma et une crise de confiance entre les autorités maliennes et la Minusma », a-t-il insisté.

Le ministre malien des Affaires étrangères n’a en revanche pas répondu aux inquiétudes du Conseil sur l’entrave à la liberté de circulation des casques Bleus par son pays. Bamako estime par ailleurs que la recommandation du secrétaire général de réduire la voilure et recentrer les missions de la Minusma ne répond pas à ses besoins.

Enfin, il a passé du temps à se justifier sur le massacre commis à Moura en 2022, où la responsabilité des forces maliennes est déplorée par le Haut-Commissariat aux Droits de l’homme et il dénonce l’enquête. Pour lui, son armée n’a fait qu’éliminer un nid de terroriste qu’aucune autre force n’osait attaquer. C’est peut-être cette mention dans le rapport d’Antonio Guterres, il y a quelques jours qui aurait mis le feu aux poudres.

« Presque impossible » de mener une mission dans ces circonstances
Suite à la demande de Bamako, le chef de la mission de l’ONU au Mali, El Ghassim Wane, a expliqué que cela rendait l’opération de maintien de la paix onusienne « presque impossible ». « C’est une décision qui doit être prise par le Conseil [de sécurité], mais ce que je veux faire valoir, et tout le monde est d’accord sur ce point, c’est que le maintien de la paix est basé sur le principe du consentement du pays hôte, et sans ce consentement, les opérations sont presque impossibles », a-t-il déclaré à la presse.

Enfin, Jean-Hervé Jézéquel, de l’International Crisis Group, alerte sur les conséquences d’une telle annonce sur le terrain pour les civils. « On observe ces dernières années une brutalisation du conflit au Mali. C’est-à-dire qu’il y a une augmentation assez inquiétante du nombre de victimes civiles. Or, la Minusma était une protection des violences contre les civils, sans doute mince, sans doute très imparfaite, mais la mission tentait de maintenir les stratégies de contre-insurrection dans certaines limites. »

Rfi

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