Guerre en Ukraine : pourquoi le ton monte entre certains pays d’Afrique et Kiev
Le Mali, puis le Niger, ont annoncé la rupture de leurs relations diplomatiques avec l’Ukraine. Les deux pays africains, avec le soutien de la Russie, accusent Kiev d’avoir contribué à la mort de soldats maliens lors d’affrontements avec des rebelles fin juillet.
L’Ukraine mène-t-elle son combat contre la Russie à l’international ? C’est la question qui se pose, alors que Kiev est accusé par plusieurs pays africains d’avoir aidé des rebelles touaregs lors de combats intenses dans le nord du Mali. Plus de 80 soldats maliens seraient morts dans ces affrontements, ainsi qu’une cinquantaine de mercenaires du groupe russe Wagner.
1. Que sait-on des affrontements de fin juillet au Mali ?
Fin juillet, l’armée malienne a subi une lourde défaite contre des séparatistes et jihadistes lors de combats à Tinzaouatène, à la frontière algérienne dans l’extrême nord-est du pays. Les rebelles touaregs ont dit avoir tué au moins 84 mercenaires de Wagner et 47 soldats maliens. L’armée malienne et Wagner ont reconnu des pertes importantes, sans donner de bilan précis. Cette défaite est la plus lourde subie en une bataille par le groupe Wagner en Afrique, selon les analystes interrogés par l’AFP.
2. Pourquoi l’Ukraine est-elle accusée d’avoir contribué à la défaite malienne ?
Un responsable du renseignement militaire ukrainien, Andriï Ioussov, a laissé entendre samedi à la télévision ukrainienne que Kiev a aidé les rebelles dans la préparation de leur attaque. « Le fait que les rebelles aient reçu les données nécessaires qui leur ont permis de mener à bien une opération contre les criminels de guerre russes, a déjà été observé par le monde entier. Bien entendu, nous ne divulguerons pas les détails. Plus d’informations à venir ici aussi », a-t-il déclaré.
Cette vidéo a été relayée par l’ambassadeur ukrainien au Sénégal. Pour le Mali, comme pour le Niger, l’Ukraine serait donc directement impliquée dans la mort des soldats maliens. Une affirmation niée par le ministère des Affaires étrangères ukrainien lundi.
« Incapable de vaincre la Russie sur le champ de bataille, le régime criminel de (Volodymyr) Zelensky a décidé d’ouvrir un deuxième front en Afrique et soutient des groupes terroristes dans des Etats du continent favorables à Moscou », a dénoncé de son côté ce mercredi la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, citée par l’agence Ria Novosti. Le groupe privé Wagner, sur lequel s’appuie le gouvernement russe dans sa guerre en Ukraine, est également utilisé par le gouvernement malien pour lutter contre les rebelles.
3. Quelles sont les conséquences de ces déclarations ?
Le Mali a, à l’issue de ces déclarations, annoncé dimanche la rupture de ses relations diplomatiques avec l’Ukraine, avec « effet immédiat ». Une rupture jugée « précipitée » par Kiev. Le Niger a fait de même mardi. Les deux pays africains, dirigés respectivement par le colonel Assimi Goïta et le général Abdourahamane Tiani, se sont rapprochés de la Russie après l’arrivée au pouvoir de régimes militaires hostiles aux pays occidentaux et accueillent des instructeurs russes.
Le régime nigérien a également annoncé « la saisine du Conseil de sécurité des Nations unies en vue de statuer sur l’agression ukrainienne ». Samedi, les nouvelles autorités sénégalaises ont, de leur côté, indiqué avoir convoqué l’ambassadeur d’Ukraine à Dakar, quand le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a réaffirmé son soutien à Bamako.
Lundi, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), que le Mali et le Niger ont quittée en janvier – comme le Burkina – , a exprimé « sa ferme désapprobation et sa ferme condamnation de toute ingérence étrangère dans la région ». Elle a également condamné « toute tentative visant à entraîner la région dans les affrontements géopolitiques actuels ».
Les Echos