Tasiast Mauritanie: la présence de Vanguard dans son capital va-t-elle éclaboussé son image?

Alors que le prix de l’or atteint des sommets inédits, la filiale mauritanienne Tasiast, détenue par le groupe canadien Kinross Gold, se retrouve au cœur d’une polémique liée à l’un de ses actionnaires: la société américaine Vanguard. Cette dernière a été récemment pointée du doigt par le Comité des droits de l’homme de l’ONU pour son implication présumée dans la livraison d’armes à Israel dans son génocide à Gaza.
En juin 2024, des experts des Nations Unies, dont le Groupe de travail sur les entreprises et les droits de l’homme, ont publié une déclaration (la déclaration des experts de l’ONU) appelant les investisseurs et les entreprises à s’assurer qu’ils ne sont pas directement ou indirectement impliqués dans les transferts d’armes vers Israël, ou à défaut, à assumer le risque d’être tenus responsables de violations des droits humains.
Détentrice de 3,8 % du capital de Tasiast, Vanguard est mentionnée dans le rapport des Nations Unies accusant certaines entreprises de fournir des armes à Israël, utilisées contre des civils palestiniens. Les experts de l’ONU ont appelé les fabricants d’armements et les investisseurs à mettre fin à tout transfert d’armes vers Israël, sous peine de responsabilité dans de potentielles violations des droits humains.
Une présence embarrassante pour Kinross et l’État mauritanien
Vanguard, interpellée officiellement en 2024, n’a pas répondu aux demandes d’explication concernant ses livraisons présumées à l’État hébreu (https://www.business-humanrights.org/en/latest-news/vanguard-did-not-respond–to-urgent-call-by-un-experts-to-cease-the-transfer-of-arms-to-israel). Elle s’est murée dans un silence coupable. Sa présence controversée dans le capital de Tasiast en Mauritanie met Kinross dans une position délicate; elle qui cherche à se présenter comme une entreprise socialement responsable, engagée auprès des communautés locales. Or, Tasiast représente une part importante de l’activité minière du pays. En 2023, selon l’Initiative pour la transparence dans les industries extractives (ITIE), elle a contribué à hauteur de 28,7 % aux 80 % de recettes d’exportation générées par le secteur minier mauritanien. De plus, la mine fournit 29 % de la production totale du groupe Kinross. Sa stabilité et sa réputation sont donc cruciales pour toutes les parties d’autant que la présence de Vanguard est également gênante pour l’État mauritanien, dans un contexte de solidarité populaire envers les victimes palestiniennes. La question palestinienne reste centrale pour l’ensemble des mauritaniens.
Outre Vanguard, d’autres sociétés de gestion d’actifs américaines sont présentes dans le capital de Tasiazt. Van Eck qui a aussi sa filiale israélienne est le principal actionnaire institutionnel avec 8,8 % des parts. Boston Partners Global Investors détient également une part équivalente à celle de Vanguard (3,8 %).
Vers une responsabilité juridique ?
La déclaration de juin 2024 du Groupe de travail des Nations Unies sur les entreprises et les droits de l’homme était sans ambiguïté : les entreprises et investisseurs doivent s’assurer de ne pas être directement ou indirectement impliqués dans des transferts d’armes à Israël. À défaut, ils s’exposent à des poursuites pour complicité dans des violations graves des droits humains.
Vanguard, aujourd’hui inscrite dans la liste des entreprises soupçonnées de participation au conflit à Gaza se retrouve donc sous le feu des projecteurs (https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_d%27entreprises_impliqu%C3%A9es_dans_la_guerre_de_Gaza). La question morale est donc inévitable : dans quelle mesure Vanguard, qui tire profit de ses investissements en Mauritanie, contribue-t-elle indirectement au conflit à Gaza et à ses conséquences humanitaires tragiques ? Comment réagira Tasiazt à cette accusation pour ne pas être éclaboussée par la présence dans son capital de Vanguard ? That’s the question.
Malgré une baisse prévue de sa production annuelle autour de 500 000 onces, Tasiast nourrit encore des ambitions en Mauritanie. Grâce à la flambée du prix de l’or, les pertes de volumes sont compensées en 2025. La société prévoit même une remontée de la production à plus de 600 000 onces d’ici 2028 et y a consenti d’énormes investissements.