La malédiction de Sisyphe ou la maladresse en boucle
Certaines situations relèvent d’une réminiscence telle qu’elles s’imposent à nous comme s’il s’agissait de l’unique choix que le ciel nous propose.
Pourtant, le monde évolue un peu vite d’ailleurs et les grands enjeux avec lui. Mais à sa table, nous, nous jouons toujours la même main, les mêmes cartes. Il s’agit là d’un mépris inégalé pour toutes ces aspirations et ces générations qui se succèdent dont certaines ont été bradées et d’autres se bousculent sur la rampe des olympiades de l’immigration clandestine.
Oui, ce n’est pas nouveau, les mêmes causes produisent les mêmes effets et nos politiques n’y dérogent pas !
Sinon comment m’expliquerez-vous que nos enfants fassent le mur pour aller chez l’oncle Sam eux auxquels l’avenir promet le Pétrole, l’Or, le Gaz et la prospérité mixés à la magie de la SCAPP (La Stratégie de croissance accélérée et de bien-être partagé) doublée à présent du levier Taahoudaty-Toumouhaty (mes engagements-mes ambitions).
Il n’y a, vous me direz, pas d’explications car cela a valu pour d’autres ressources dans le passé et le présent, le Fer, le Poisson mais surtout les Femmes et les Hommes de ce vaillant peuple.
Serait-ce, un mauvais poil, une malédiction, un mauvais karma, la scoumoune ?
Comment expliquer alors nos difficultés, sans être matheux (encore une fois), en faisant juste un usage intelligent des quatre opérations arithmétiques de base.
Oui évitons surtout les discours académiques, les analyses stratégiques, les sondages etc. Tout cet arsenal des expertises émérites qui nous ont gavé jusque-là avant la chute de plusieurs de leurs modèles.
Certains, comme moi ne comprendraient plus! Il parait qu’un chef auquel on accorde un C.A.P aurait un jour dit à propos d’un grand cadre, une référence académique de surcroit : “…il n’a que de la théorie !”. Je le lui concède car à voir le chemin franchi et la pléthore de nos cadres, il y a de quoi lui donner raison.
Mais à contrario et à leur décharge peut-être qu’ils ont à chaque fois une hiérarchie (parfois limitée) qui impose son point de vue ! Evidemment cela ne dédouane ni les uns ni les autres.
Loin de moi, bien sûr, l’idée d’être réducteur pour l’enseignement, la formation et l’éducation en général dont l’épanouissement et le développement d’une nation demeurent tributaires.
Je vous propose donc juste cette arithmétique simple de rapporter nos ressources à notre population …diantre que ce n’est pas compliqué !
Un ami parlait dernièrement de l’Indonésie qui arrive à rayonner avec 700 langues et 280 Millions d’habitants ! Ils sont quasiment à 50% de faire le podium du record d’une langue par habitant !
Mieux, ce pays fait partie des pays émergents les plus prospères ! Alors, avec nos 4 langues et nos 4 à 5 millions d’habitants sauf à être “doués” on aurait dû réussir notre coup !
Je suis moulé, abreuvé dans cette forte foi qui est la nôtre et je crois en l’augure, la prédiction et les signes.
Sauf qu’il n’en est rien ! Le ciel nous protège et depuis belle lurette sinon comment tenir aussi longtemps à vau-l’eau ? Il n’y a aucun mauvais augure et encore moins une malédiction insurmontable ! Point de Sisyphe et encore moins de rocher.
Non, rien de tout cela, plutôt notre funeste maladresse comme celles protocolaires durant la cérémonie d’investiture du Président de la République.
Juste pour rappel, le protocole et l’étiquette comme les programmes de certifications sont d’abord, pour la faire courte, un ensemble de règles dont on convient que l’on transcrit ensuite et que l’on s’oblige enfin le strict respect. Elles sont là pour conforter un cérémonial, une procédure. Je me limiterais ici à deux :
– Les invités officiels de la cérémonie arrivent pour les vœux depuis la gauche du Président, l’obligeant à chaque fois de les inviter à sa droite pour la photo…
– Le Président a quasiment été le dernier à sortir de la salle….
– Etc.
Comme dans certaines activités, c’est “l’erreur humaine” et pour nous, la maladresse en boucle dans sa forme la plus destructrice.
Cette habile maladresse que nous avons à nous mélanger les pinceaux à tous les coups ! Et nous avons chacun sa responsabilité, sa pierre de par l’action ou l’inaction dans ce désolant édifice.
Le célèbre Abou Teyeb Ahmed ibn al-Hussein qui se faisait appeler Al-Mutanabbī disait comme s’il s’adressait à nous :
وَلَم أَرَ في عُيوبِ الناسِ شَيئاً كَنَقصِ القادِرينَ عَلى التَمامِ
Cela pourrait se traduire par :
Il n’y a pire défaut chez les gens
Que celui de ceux qui ont tout pour être parfaits et n’y arrivent pas !
Des niveaux faramineux de trésorerie ont été injecté de manière inédite dans l’économie sociale allant des allocations mensuelles (transfert téléphone), la Cnam, la Cnass, les frais de Dialyse etc. Jamais ces seuils n’ont été atteints ! Il s’agit de plusieurs centaines de milliards de nos ouguiyas !
Pourtant c’est à se demander, ils sont passés où, comme beaucoup d’autres actions qui s’évaporent par un “by-pass” bien huilé aujourd’hui. Ceux-ci, sont juste victime de notre communication contreproductive. Il parait que dans certains hameaux les bénéficiaires croient recevoir des aides depuis des ONG internationales (si cela ne leur est pas soufflé !) Les mauvaises communication et gestion ont malheureusement causé beaucoup de tort.
Le mandat passé a connu la communication la plus contreproductive rapportée à un gouvernement dont la politique sociale est au centre de l’action avec des financements d’une importance inédite.
Il faut comprendre que dans notre pays quelques soient les bonnes intentions du dirigeant du moment, c’est inévitablement les viviers politiques d’atmosphère qui végètent et se recyclent depuis des lustres (quasiment les mêmes) qui prennent le dessus. Ils arrivent toujours à dévier de leur trajectoire les meilleurs de nos cadres.
Je suppose que tout cela résulte de notre incapacité à faire face à l’essentiel, la cohésion nationale et le vivre-ensemble. Ces concepts dont les prérequis consacrent la bonne gouvernance par la méritocratie.
C’est là le passage obligé pour se ressaisir, se reconstruire, se relever. C’est là et par là que la nation se construit.
Un nouveau gouvernement est désigné à présent et je m’en réjouis car il porte en lui cet air de « savoir-faire » qui rassure ou en tout cas je le pressens. On pourra dire ce l’on veut du nouveau Premier Ministre mais vous aurez remarqué que les plus virulents habituellement lui reconnaissent cette capacité de faire ce qu’il dit et de savoir coordonner avec beaucoup de mérite.
Je le lui reconnais aussi comme cette approche avenante et cordiale avec ses interlocuteurs. Très peu de ceux qui se fossilisent dans l’administration en écrémant les leurs peuvent se prévaloir de cette capacité. C’est ce que nous attendons de nos élus et nos hauts fonctionnaires d’œuvrer pour l’intérêt général au-delà de leurs poches.
Le nouvel organigramme présage déjà des préoccupations actuelles liées à la Jeunesse ou comme ce département des Domaines, des biens de l’Etat et de la Réforme Foncière. Beaucoup ne voient pas cet autre aspect encore plus grave de la gabegie qui est lié au patrimoine immobilier (bâtiments et infrastructures), roulant et foncier qui se détériorent à vue d’œil depuis des décennies.
Une autre dénomination est d’une importance capitale si toutefois on lui donnait le contenu au-delà du contenant. Il s’agit du Département de la Défense Nationale avec une nouvelle appellation qui lui va comme un gant rapporté à nous : Ministère de la Défense, des Affaires des Retraités et des Fils de Martyrs. Certains se posent la question de savoir ce que le terme martyr comprendrait.
N’étant pas dans la confidence des décideurs, j’en ai une lecture personnelle :
Le terme “Martyrs” pourrait couvrir les enfants des martyrs de :
– la Résistance coloniale sur l’ensemble du territoire (vraiment l’ensemble SVP !)
(Guerrière, des mahadras et confréries…)
– la guerre du Sahara
– Le 16 Mars
– les Evénements de 90-91
– Le 3 juin 2003
– Les campagnes en territoire Malien
– Etc
Il faut dire qu’avec les extrémistes de tous bords que nous avons chacun aura son prisme étroit de lecture !
Ernest Renan disait que : “Ce qui constitue une nation, ce n’est pas de parler la même langue, ou d’appartenir à un groupe ethnographique commun, c’est d’avoir fait ensemble de grandes choses dans le passé et de vouloir en faire encore dans l’avenir.” Il s’agit bien de mon point de vue de faire la nation après le pays, l’histoire après la géographie.
Nos Pères fondateurs dans leur diversité ont créé ce pays, ils ont jeté les bases de sa Nation. Hélas, cette trajectoire a été écourté passant par plusieurs corpus politiques qui ont malheureusement à chaque fois éloigné davantage la perspective d’atteindre cet objectif.
Nous avons besoin, aujourd’hui plus que jamais pour nos enfants, dans cette transmission de témoin entre les générations de leur léguer le terreau fertile d’une nation consolidée et reconciliée. D’éviter justement dès à présent de cliver les générations futures. Cela est possible, mais seulement à la faveur d’une volonté ferme d’y arriver.
Que l’on ne se trompe pas toutes les dérives électorales et les tragédies qui en découlent, le manque de solidarité face à tout et son contraire sont le fait de ces tiroirs que l’on se refusent à ouvrir, la cohésion sociale, le vivre-ensemble et le passif humanitaire.
Ils n’ont surtout rien à voir avec les candidats et encore moins avec leurs programmes. Non il s’agit d’un côté comme de l’autre de vecteurs qui saisissent l’opportunité de la vague qui passe.
Le genre, l’ethnie et la qualité du candidat comptent pour peu car l’essentiel est la mesure du chemin qu’il fera franchir bien plus que toute autre considération.
Je crois qu’il est grand temps d’assainir cette situation de manière objective, honnête et désintéressée de tout commerce politique. On ne peut hypothéquer l’avenir d’un pays, d’une nation, sa cohésion et son vivre-ensemble pour le compte de quelques individus.
On ne peut continuer dans cette Mauritanie des parallèles et de la division. Car à ce rythme, elle sombrera du fait de ses extrémistes de tous bords qui la tiraillent.
Personne ne viendra nous aider à la reconstruire, ni pour les uns et encore moins pour les autres. Oui, personne car les lignes rouges ont fortement reculé et la communauté internationale a tant de problèmes que les nôtres passent pour des caprices !!
Plus sérieusement, avons-nous, tant que ça perdu foi en nous pour penser que nos problèmes peuvent être réglés ailleurs que par nous-même ?
Dans cette perspective je suggère de procéder par deux questions essentielles.
– L’Ecole Républicaine (l’Education Nationale)
– La Cohésion Nationale et le Vivre-ensemble
Dans mon choix et mon soutien assumés au Président de la République Monsieur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, je me réjouis surtout qu’il fasse partie de ce grand nombre des membres de nos forces armées et de sécurité dont la carrière n’a jamais été entachée.
Aussi et juste pour rappel, il y a cette notion de prise en main dont on parle souvent chez les corps constitués pour indiquer la capacité à commander (gouverner, diriger etc.) les hommes chez certains gradés par rapport à d’autres. Il a donc de par l’expérience la prédisposition et certainement aujourd’hui l’ambition d’apporter des réponses à ces questions. Bref
1) L’Ecole Républicaine (l’Education Nationale)
Les deux concepts sont intimement liés et peuvent être interdépendants. Mais dans l’absolu, l’école construit la nation. Pour la petite histoire, je raconte toujours que même pour un copier-coller nous l’avons mal réussi car il y a le bon et c’est un art qui permet des raccourcis en préservant l’éthique dans certaines conditions.
Nous avons par exemple pris à la France certaines appellations des départements ministériels. Sauf que nous n’avons pas pris le temps de comprendre les raisons de certaines appellations. Par exemple, pourquoi seuls deux départements, la Défense et l’Education (Ce n’est plus le cas car ils ont compris depuis) portaient dans leur dénomination le mot Nationale ! C’était en réalité pour rappeler leur sacralité pour la souveraineté mais surtout leur intouchabilité.
Les réformes et orientations dans ces secteurs relèvent quasiment du domaine référendaire.
Les différentes réformes de notre système éducatif, elles, n’ont à ce jour servi qu’à cloisonner davantage notre société au profit d’un réseau privé national dont les lignes d’enseignement varient d’une école à l’autre.
D’un côté vous avez ce réseau avec le risque comme pour certaines de fermer au bout d’un trimestre et de l’autre les écoles étrangères qui vous prennent votre capital et les intérêts avec.
Pour ces dernières, il y a au moins un bémol car elles construisent votre enfant, lui apprennent la méthode, la critique et la synthèse mais pour un autre monde pour ne pas dire, univers. La nature a horreur du vide.
La décision de faire évoluer le système de « l’Excellence » de certaines écoles vers l’émergence et la généralisation de l’Ecole Républicaine Pour Tous est un acte courageux et salutaire au profit de la refondation de l’unité nationale. Il s’agira désormais comme on le dit en Hassania de veiller « comme à sa prière » afin qu’au-delà des éléments du paraitre qu’elle ait le contenu approprié qui commence déjà à l’Ecole Normale des Instituteurs avec la maitrise par l’instituteur du programme pédagogique. C’est là et seulement là que la nation se construit et que l’avenir apaisé et épanoui de nos enfants se dessine.
2) – La Cohésion Nationale et le Vivre-Ensemble
Il est grand temps de remettre sur la table la question des événements tragiques que le pays a connus les années 1990-1991.
Une tragique situation d’une gravité extrême qui gangrène notre société. Une timide tentative de résolution a eu lieu durant la période à cheval entre les Présidents Sidi ould Cheikh Abdellahi (Paix à son âme) et Mohamed ould Abdel Aziz. Cette initiative a fini malheureusement en queue de poisson et ses engagements se sont vite évaporés. Quand on sait qu’il y a eu morts d’hommes dans des conditions insoutenables on peut comprendre mais certainement pas mesurer la peine, la douleur et la souffrance des leurs.
Cette question primordiale constitue de manière incontournable le handicap au départ à toute cohésion ou vivre-ensemble dans des conditions sereines et apaisées.
Comme on devrait aisément comprendre que cette situation ait fait des petits depuis au détriment de la cohésion sociale.
J’en appelle, ici, au Président de la République mais aussi à cette majorité silencieuse, celle rappelez-vous qui se complaît dans son silence coupable à voir dans nos tragédies récurrentes à chaque fois un nuage passager. Elle oublie ainsi qu’elle participe à chaque fois à détruire un peu plus l’opportunité de cette cohésion et son vivre-ensemble.
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J’ose espérer et je suggère fortement que nous puissions durant ce second mandat pour lequel le Président de la République Monsieur Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani est investi aujourd’hui, dérouler le processus de réconciliation et de cohésion nationales.
Afin de conforter la perspective de réussite de ce processus que nous appelons de tous nos vœux, le premier acte pourrait être la mise à l’écart, juste la mise à l’écart, des acteurs qui lui sont limitants quels qu’ils soient. C’est déjà un pas important.
Quoi de plus exaltant que de faire du mandat de la jeunesse par la jeunesse celui également de la réconciliation nationale pour le vivre-ensemble.
Par Mohamed Mahmoud Ba Ould Ne