Mauritanie : Le seul pays auquel le FMI a prédit 14,3% de croissance en 2025, et il n’y a pas que le gaz
La Mauritanie est un pays d’Afrique occidentale scindé en 12 régions mais la majeure partie de cet immense territoire (1 030 700 km²) est mangée par le désert. Les populations et les activités économiques se concentrent sur une petite portion du pays, toutefois le pétrole et le gaz, à profusion dès cette année, pourraient changer toute la donne. Les 5 millions de Mauritaniens regardent l’avenir avec sérénité et confiance, avec beaucoup de rêves dans les yeux. Et pourquoi pas un brillant destin comme celui des pays du Golfe, que les hydrocarbures ont fait connaitre aux quatre coins du monde alors qu’eux aussi n’étaient que des étendues désertiques sur les cartes du globe il y a quelques décennies.
Le filon du méga gisement de Bir Allah
Le pétrole et le gaz ça vous change radicalement un pays en un court laps de temps. Bon, de telles réflexions font bondir les défenseurs de l’environnement, qui pointent les souffrances que les énergies fossiles infligent à la planète Terre, au climat. Mais l’Afrique, qui est le continent qui pollue le moins et qui attend toujours que l’Occident tienne ses promesses (réparation financière pour les dégâts climatiques), fera valoir ses droits au développement avant de tendre l’oreille à la musique culpabilisante des Occidentaux. En parlant de développement la Mauritanie est sur les bons rails, d’après les dernières prévisions du Fonds monétaire international (FMI)…
Je ne vous parle pas seulement des retombées de l’imposant gisement gazier GTA, découvert à la frontière maritime entre la Mauritanie et le Sénégal, et que les deux pays ont sagement décidé de partager à parts égales. Je vous parle de quelque chose de plus gros encore et que cette fois Nouakchott ne partagera avec personne, vu que le gisement se trouve intégralement sur le territoire mauritanien : Le gisement de Bir Allah, dont les réserves sont estimées à 80 000 milliards de pieds cubes.
Pour ces raisons et bien d’autres le FMI prédit au pays un taux de croissance de 14,3% en 2025, le meilleur en Afrique. La Mauritanie en a fait du chemin depuis 1946, date à laquelle elle a été classée territoire français d’outre-mer. 12 ans après, en 1958, le pays est devenu une République islamique autonome. Mais dès 1960 il revendique et obtient son indépendance, au grand dam du Maroc, qui a crié partout que la Mauritanie était un morceau de son territoire. Dommage que la manoeuvre ne passa pas, autrement le Maroc serait assis aujourd’hui sur d’immenses ressources naturelles (pétrole, gaz, fer, uranium, etc.).
Stabilité politique et prouesses sécuritaires, de solides gages pour l’investissement
Le premier président de la Mauritanie, Moktar Ould Daddah (1961-1978), a fait ce qu’il a pu, adossé sur un parti unique, mais ça n’a pas suffi à extirper de la pauvreté la majeure partie de la population. C’est sans doute cet échec qui lui a valu le coup d’Etat de 1978. La junte militaire installa un Comité militaire de salut national. Et ce sont les mêmes militaires qui ont impulsé les réformes démocratiques, en 1992, avec pour point culminant des élections pluralistes, sous la houlette du colonel Maaouya Ould Taya, aux manettes depuis 1984.
Ce n’est pas la fin des tourments pour autant, il y aura un autre chapelet de putschs au XXIe siècle, mais les acquis démocratiques n’ont jamais été gommés dans les esprits. La preuve : Une alternance pacifique s’est opérée à la présidence de la République en 2019, avec l’élection de Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, qui a été reconduit dès le premier tour en juin 2024. Une victoire nette contestée par une frange de l’opposition, avec des manifestations émaillées par 4 morts. Mais la digue de la démocratie a tenu.
La stabilité politique est sans doute un des grands atouts de la Mauritanie, un système bétonné par un régime semi-présidentiel dans lequel les pouvoirs exécutifs sont partagés entre le chef de l’Etat et son Premier ministre. Il y a aussi les exploits sécuritaires du pays. Alors que les terroristes frappent régulièrement dans les autres pays du Sahel la Mauritanie n’a connu aucun drame notable depuis 2011. Le pays doit ce succès au renforcement de l’appareil sécuritaire et de renseignement mais également à un dialogue intelligent avec toutes les sensibilités religieuses. Cette stabilité politique et sécuritaire font la force de la Mauritanie, de plus en plus courtisée par les investisseurs étrangers.
Bonne gouvernance et dette maitrisée, les réformes feront le reste
La dynamique va de pair avec des engagements fermes en matière de bonne gouvernance et de combat acharné contre la corruption. C’est ce qui a valu des procès historiques à l’ex-président Mohamed Ould Abdel Aziz (il a régné de 2009 à 2019), à ses deux ex-Premiers ministres, à une kyrielle d’anciens ministres, des hommes d’affaires et des membres du cercle présidentiel. Ces opérations mains propres sont un gage de crédibilité pour ce pays membre fondateur de l’Organisation de l’unité africaine en 1963, puis de l’Union africaine, de la Ligue arabe, de l’Organisation de la coopération islamique et de l’Organisation Internationale de la Francophonie.
Nouakchott affiche des perspectives économiques à moyen-terme très positives. Certes la croissance s’est tassée à 4,3% en 2023 mais la relance est déjà là cette année, en attendant les sommets prédits par le FMI en 2025. La croissance sera trustée par le secteur extractif (+8,3% en 2023, +11,1% en 2024, +14% en 2025), par le biais de la hausse des cours de l’or et par les premiers revenus de l’exportation du gaz à partir de 2024. Et puis il ne faut pas minorer les effets des réformes structurelles et la dynamique des PPP (partenariats public-privé) ; on peut évoquer dans ce sens la production d’hydrogène (Nour et Aman), lequel a fait l’objet de 3 gros accords avec les Européens en avril 2024.
A ajouter à la niche de l’uranium (TIRIS), dont les cours ont explosé sur le marché mondial depuis que l’Europe – la France surtout – en a fait une des alternatives parmi les “énergies propres” pour diminuer les émissions de gaz à effet de serre. De ce point de vue la Mauritanie, qui a des relations historiques avec Paris, a une belle carte à jouer. En attendant le pays continue de capitaliser sur sa dette publique relativement faible, un argument qui plait beaucoup aux bailleurs et institutions financières internationaux.
La dette publique globale est maitrisée depuis fin 2021 : Elle est passés de 49,1% du PIB en 2021 à 48,4% en 2022, et on la situe à 50% du PIB en moyenne en 2023-2024. Le risque d’endettement de la Mauritanie est passé d’élevé à modéré en janvier 2023. C’est excellent en termes de réputation auprès des partenaires. Le reste c’est la montée en gamme du climat des affaires qui le fera, et il y a urgence pour que le pays profite pleinement des retombées du gaz.
Article, extrait du numéro 12 de TN Le Mag.