De visu à Sebkha.. «Vous ne verserez point vos saletés »
La commune de Sebkha – et plus particulièrement – sa frontière qui fait face à la mer, vit un insupportable drame humain et sanitaire !!
Je passais ce midi dans le quartier pour montrer le lycée Sebkha 2 à une amie, lorsque mon attention fut captée par un mouvement de foule sur le goudron qui relie Sebkha à la mer.
Naturellement, je fis demi-tour pour voir ce qui attirait les foules sur cette route qui traçait un chemin entre des tonnes d’ordures d’un coté et les habitations prises en otages par des eaux saumâtres.
Au loin je voyais les personnes gesticuler en montrant quelque chose au milieu des habitations qu’elles n’arrivaient pas à atteindre à cause des boues nauséabondes.
Je fus prise de panique ! et si c’était un enfant qui se noyait ? ou qui s’était électrocuté ?? je ne voulais pas voir l’une de ces horribles scènes qui se répètent en ces temps d’inondations !! je n’avais pas ce courage !
Derrière moi le ton montait, une barrière se construisait sur la route … des pneus portés par des dames âgées, en colère, armées de bâtons et qui gesticulaient devant une citerne de vidanges des fosses sceptiques, suivi d’un camion débordant de poubelles, pour les empêcher d’avancer.
«Vous n’avancerez pas ! vous ne verserez pas vos déchets sur nous ! retournez d’où vous venez ! criaient ses dames, suivies finalement par tout le monde : jeunes, hommes, femmes, enfants….
Ces braves dames m’ont expliqué qu’elles étaient là depuis la veille, à monter la garde, contre ces camions qui avaient l’habitude de venir toutes les nuits vider leurs chargements derrière leurs habitations. Avec les fortes pluies de ces dernières semaines, tous les déchets liquides et solides se sont infiltrés à l’intérieur de leurs habitations, après avoir inondés les rues et les espaces publics !
Une catastrophe !
Des dizaines de familles n’avaient plus d’accès à leur maison !
Au milieu des foules, un 4×4 s’est frayé un chemin entouré de gardes….
« c’est le Hakem » ! cria quelqu’un !! « Il est revenu ! Il avait promis ce matin de revenir avec des solutions.»
Une voix rouspète : « Il y a déjà les camions citernes envoyés par la Mairie, qui aspirent les eaux depuis le matin ! Mais, cela ne servira à rien si les camions particuliers qui viennent de partout, continuent à verser leurs saletés derrière nos maisons !! Il faut arrêter de nous prendre pour des poubelles !! »
« Nous ne bougerons pas d’ici … nous ne savons plus où aller ! nos maisons sont inaccessibles, inondées, insalubres, nos enfants n’ont plus rien à manger, n’ont plus où dormir, ils vont tomber malades !! C’est haram ! » scandaient encore ces grand-mères indignées, alors que je m’éloignais, impuissante, le coeur brisé.
Malgré tout, je garderais précieusement cette forte image du courage et de la détermination qui animait ces mamans de Sebkha :
Un contraste frappant avec une résignation et un fatalisme qui dominent terriblement dans les autres quartiers sinistrés que j’ai visité.
Allah el mousta3ane !
Citoyenne Lambda