L’Initiative Globale pour la Paix et la Sécurité en Afrique (IGPSA) a tenu son 1er webinaire – «Le Sahel, synthèse des défis et urgences de l’Afrique»

23 novembre 2022 – L’IGPSA vise à promouvoir les approches multilatérales sur les enjeux de paix, de sécurité et de développement sur le continent africain.

L’Initiative Globale pour la Paix et la Sécurité en Afrique (IGPSA) a tenu son premier webinaire le 17 octobre 2022 de 10h30 à 12H (UTC+2). Suscitant l’intérêt de plus d’une centaine de personnes, il a porté sur les bouleversements sécuritaires, politiques, humanitaires ou encore climatiques auxquels les pays du Sahel sont confrontés.

Ce premier webinaire a réuni quatre personnalités dont les parcours et expertises ont permis des échanges de haut-niveau :

Mme. Emanuela Claudia Del Re, Représentante spéciale de l’Union européenne pour le Sahel (RSUE) ;
Dr Camille Laville, Chercheuse à la chaire d’économie de défense de l’IHEDN et Chercheuse associée au CERDI-CNRS-IRD ;
M. Albert PAHIMI PADACKE, ancien Premier ministre du Tchad ;
Dr Cheikh Tidiane Gadio, ancien ministre des Affaires étrangères du Sénégal et Président de l’Institut Panafricain de Stratégies, Paix-Sécurité-Gouvernance (IPS).
Les discussions ont été animées par M. Ousmane Ndiaye, rédacteur en chef Afrique du média de référence, TV5Monde. Après un état des lieux succinct de la situation dans le Sahel et afin d’apporter une perspective plus large, les intervenants ont partagé leurs points de vue à travers différents prismes : politiques, sécuritaires ou encore économiques.

Les discussions se sont clôturées par une session de questions réponses entre les intervenants et les participants.

Les intervenants ont partagé leurs grandes inquiétudes quant à l’évolution de la situation dans le Sahel. Il a été rappelé que les fondamentaux de la stabilité et du développement y sont très fragilisés, exposant les gouvernements et surtout les populations. Jusqu’à présent, force est de constater l’échec des politiques locales mises en œuvre par les États pour inverser durablement cette dynamique. Il en est de même de l’aide et du soutien apportés par les partenaires étrangers et les grandes institutions internationales. Le terrorisme djihadiste progresse, menaçant dorénavant les États côtiers, et les services publics essentiels disparaissent (justice, santé, éducation, police). Dès lors, et sans pour autant balayer d’un revers de la main les efforts déjà engagés, il faut très certainement concevoir et déployer de nouvelles initiatives répondant mieux aux spécificités des territoires concernés et de leur population. Celles-ci doivent permettre un retour du contrôle des zones de non-droit. L’une des pistes est d’encourager et de soutenir les projets locaux, répondant aux besoins les plus urgents, avec le concours de la société civile. Simple sur le papier, cette option suppose toutefois de trouver des interlocuteurs organisés et légitimes ainsi que de pouvoir travailler dans un environnement sécurisé. Or, ces conditions sont difficiles à réunir. L’Union européenne (UE) et plusieurs États européens apportent une aide indispensable à l’Afrique et aux pays du Sahel en particulier. Si leurs actions peuvent être perçues parfois comme « désorganisées », dans les faits, elles visent toutes le même objectif : un retour à la sécurité, à la stabilité et au développement. Il faut ajouter que cet engagement, tant de l’UE que des pays européens auprès de leurs partenaires africains, se maintient dans le temps. Beaucoup craignaient que les effets de la guerre en Ukraine et de la crise sanitaire de la COVID-19 entrainent un retrait de l’aide étrangère au détriment du continent africain. Cette réalité témoigne de la relation spéciale qu’entretiennent l’UE et l’Afrique, s’affranchissant de toutes conjonctures. Enfin, plus largement, la situation du continent africain pose la question de l’aide publique au développement dont l’efficacité n’est pas au rendez-vous malgré les sommes considérables qui y sont engagées.

Ce qu’ils ont pensé du webinaire et des échanges :

Mme. Emanuela Claudia Del Re, Représentante spéciale de l’Union européenne pour le Sahel (RSUE) :

« Je tiens à remercier les organisateurs de ce webinaire. Nous avons besoin de discussions comme celles-ci car il faut parler sans relâche du Sahel ainsi que des défis auxquels cette région du monde est confrontée. Au regard de la complexité de ses maux, il est capital d’en avoir une approche la plus complète possible pour trouver des solutions inclusives et adaptées. En ce sens, si la dimension sécuritaire est importante pour comprendre l’instabilité du Sahel, il est aussi nécessaire de prendre en compte dans la recherche de solutions aux problèmes locaux les aspects suivants : la crise de la gouvernance qui caractérise de nombreux pays de la zone, avec comme corolaire l’exacerbation des tensions sociales et communautaires, la réduction drastique des opportunités économiques et le ralentissement du développement ainsi que les effets des grands mouvements de populations qui s’y tiennent. L’Union européenne (UE) et ses États membres demeurent plus que jamais engagés en faveur de la stabilisation du Sahel, du dialogue politique et intercommunautaire. C’est pourquoi, l’UE est disposée à y appuyer toutes les bonnes volontés, y compris avec des mesures et des projets concrets et en mobilisant les ressources nécessaires. Premier partenaire des États de la région, l’Union européenne y conduit une approche intégrée et privilégie la recherche d’un partenariat d’égal à égal. Son action couvre l’ensemble du spectre de la coopération : dialogue politique et action diplomatique ; appui en matière de sécurité ; aide au développement y compris pour assurer l’accès durable aux ressources ; aide humanitaire. »

Dr Camille Laville, Chercheuse à la chaire d’économie de défense de l’IHEDN et Chercheuse associée au CERDI-CNRS-IRD) :

« J’ai été ravie de prendre part aux échanges de grande qualité qui ont eu lieu lors du premier webinaire de l’IGPSA. Je félicite les organisateurs pour avoir réuni des acteurs clés dans un espace de dialogue franc autour des enjeux locaux, nationaux et transnationaux de sécurité et de développement en Afrique de l’Ouest. Face aux défis immenses, ces espaces de discussion ouverts aux questions du public sont précieux. Je crois qu’il est essentiel que les Africains soient conscients des enjeux en cours et de leur rôle actif dans la résolution du conflit. A l’heure où l’accès à l’information est un enjeu stratégique, de telles initiatives sont indispensables pour trouver un terrain d’entente en vue de partenariats efficaces. »

M. Albert PAHIMI PADACKE, ancien Premier ministre du Tchad :

« Ce débat, auquel j’ai eu l’honneur de participer avec beaucoup de plaisir, a été très instructif pour m’aider à apprécier encore mieux l’ensemble des défis auxquels le Sahel en particulier et l’Afrique en général sont confrontés. La complexité des menaces exige des réponses holistiques, tant locales qu’internationales, avec en pivot un partenaire majeur, l’Union européenne (UE). La menace terroriste islamiste dans le Sahel se nourrit des fragilités locales existantes. Citons la mauvaise gouvernance avec ses corollaires en termes de rébellions armées, la pauvreté, le chômage des jeunes et les effets du changement climatique. En complément de la réponse militaire en cours, il faut s’attaquer sans tarder à la question de la gouvernance dans le sens le plus large du terme. La difficulté à dépasser pour les Africains et leurs partenaires, au Sahel en particulier, est de ne surtout pas tomber dans le piège des accusations réciproques. Malgré les critiques concernant l’efficacité des réponses proposées et l’impatience compréhensibles des populations victimes, il nous faut continuer à dialoguer et à avancer ensemble. Du reste, les discours d’une partie de la jeunesse, tendant non pas à rechercher une indépendance de l’Afrique mais plutôt à s’inventer un nouveau « maître », sonne comme une dangereuse désespérance, nourrie par une vaste manipulation en ligne qu’il convient de traiter. D’où l’urgence de faire en sorte que les bénéfices des relations entre l’Afrique et ses partenaires dont l’UE quittent rapidement la case des élites dirigeantes pour se faire sentir jusqu’aux villages des peuples sahéliens et africains. »

Dr Cheikh Tidiane Gadio, ancien ministre des Affaires étrangères du Sénégal et Président de l’Institut Panafricain de Stratégies (IPS) :

« J’ai eu le plaisir d’avoir participé à un échange de qualité, franc et approfondi, tout à fait à la hauteur de l’extrême gravité de la situation du Sahel. Félicitations aux organisateurs car il est urgent pour les Africains de prendre la mesure des défis et des urgences de la crise multiforme du Sahel et de leur rôle et place dans sa résolution. Il est aussi indispensable pour les Africains de reconstruire des partenariats rénovés et innovants avec leurs amis et alliés traditionnels. Il n’y a pas – dans cette crise sans précédent – de place pour des chevauchées solitaires et pour une inflation de “Plans Sahel”. Il faut aller ensemble, coordonner, harmoniser, mutualiser et gagner ensemble! »

A propos de l’IGPSA

L’Initiative Globale pour la Paix et la Sécurité en Afrique (IGPSA) vise à promouvoir les approches multilatérales sur les enjeux de paix, de sécurité et de développement sur le continent africain. Se voulant être un trait d’union entre le continent européen et l’Afrique, l’IGPSA s’inscrit dans la dynamique née de l’édition 2021 du Forum international de Dakar sur la Paix et la Sécurité en Afrique et doit permettre de poursuivre et d’approfondir les riches échanges entamés à cette occasion, tant par les responsables politiques que par les experts au profit d’une meilleure compréhension mutuelle.

Tournée vers la jeunesse et les talents, cette Initiative se veut résolument ouverte, inclusive et participative. À travers des publications et des rencontres, l’IGPSA ambitionne d’aborder des sujets stratégiques aussi variés que les questions relatives à l’autonomisation stratégique des pays africains, la consolidation et la coordination des mécanismes de coopération, la promotion des bonnes pratiques en matière de gouvernance et de développement, la lutte contre les nouvelles menaces, notamment la cybercriminalité et la désinformation.

Le lancement de l’Initiative Globale pour la Paix et la Sécurité a été soutenu par l’Union européenne.

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