Dans un entretien avec Sharq Al Awsat: Ghazouani salue l’initiative de Trump pour Gaza tout en réaffirmant son attachement à la solution à deux États

Depuis Riyad, où il participe à l’Initiative pour l’investissement futur, le président mauritanien Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani a salué le plan de paix du président américain Donald Trump pour la bande de Gaza, tout en soulignant que son succès dépendra du respect de ses engagements et de la volonté sincère des parties impliquées. Il a rappelé qu’« il n’existe pas d’alternative à la solution à deux États pour garantir la stabilité et la sécurité dans la région ».
Dans un entretien accordé au quotidien Asharq Al-Awsat, Ghazouani a également mis en avant la solidité des relationsentre la Mauritanie et l’Arabie saoudite, « unies par des liens historiques de fraternité, d’amitié et de foi ». Il a salué la «la convergence des visions » entre Nouakchott et Riyad sur les grands dossiers régionaux et internationaux, preuve selon lui d’une confiance mutuelle profonde et d’un partenariat en constante expansion, notamment dans les secteurs de l’énergie, des infrastructures, de l’industrie et de la numérisation.
Outre la Palestine et la plate-forme FII9, le président Ghazouani interpelé sur la situation au Sahel, l’emploi des jeunes et la lutte contre la corruption livre ses sentiments à nos confrères.
Une plateforme mondiale pour l’investissement
Le président mauritanien a qualifié l’Initiative pour l’investissement futur, organisée dans la capitale saoudienne, de « plateforme mondiale pour le dialogue, l’investissement et l’innovation », saluant le rôle du royaume dans la promotion d’une prospérité partagée à l’échelle mondiale.
Il a affirmé que la Mauritanie, « destination d’investissement prometteuse », entend profiter de cette tribune pour présenter sa vision économique et ses opportunités d’affaires, tout en renforçant la coopération avec ses partenaires internationaux.
«La solution à deux États est la clé de la paix »
Évoquant le plan de Donald Trump, Ghazouani a estimé qu’il s’agissait d’« une évolution positive », car il vise à instaurer un cessez-le-feu et à mettre fin à la destruction à Gaza. Mais il a reconnu que le projet fait face à de lourds défis, liés à la mise en œuvre des engagements et à la nécessité d’une volonté politique authentique.
Il a réaffirmé que la création d’un État palestinien indépendant, conformément aux résolutions internationales et à l’initiative arabe de paix, demeure « une condition essentielle à la stabilité et à la sécurité régionales ».
«Les accusations de déportation sont infondées»
Le chef de l’État mauritanien a par ailleurs démenti les accusations selon lesquelles son pays aurait expulsé des migrants africains. Il a dénoncé des informations exagérées ou manipulées par certaines plateformes en ligne, soulignant que la Mauritanie fait face depuis plusieurs années à un afflux massif de migrants irréguliers cherchant à rejoindre l’Europe.
Face à cette situation, le gouvernement a lancé un recensement général des étrangers et procédé au rapatriement de ceux en situation illégale, « en coordination avec leurs pays et dans le respect de leur dignité ».
Ghazouani a rappelé que la Mauritanie reste une terre d’accueil : elle héberge quelque 340 000 réfugiés maliens ainsi que des dizaines de milliers de ressortissants d’autres pays africains, qui bénéficient d’un statut légal et de la protection de leurs droits.
Réformes économiques et emploi des jeunes
Reconnaissant que près de 100 000 jeunes Mauritaniens ont émigré ces dernières années en raison des difficultés économiques, le président a assuré que son gouvernement multiplie les réformes pour s’attaquer aux causes profondes de l’émigration.
« Nous avons engagé une réforme complète de notre système éducatif, développé la formation professionnelle et lancé de nombreux projets pour soutenir l’entrepreneuriat et l’emploi des jeunes », a-t-il expliqué.
Il a mis en avant les efforts du gouvernement pour diversifier l’économie, renforcer le secteur privé et créer des emplois, tout en améliorant le pouvoir d’achat et l’accès aux services essentiels. La lutte contre la pauvreté et les inégalités régionales constitue, selon lui, « un pilier de la stabilité nationale ».
Tolérance zéro face à la corruption
Abordant la question de la gouvernance, Ghazouani a rappelé n que la lutte contre la corruption était une priorité absolue :
« Le fléau de la corruption n’est pas un simple dysfonctionnement administratif, mais une menace stratégique pour l’État moderne. »
Il a mentionné la création d’une autorité indépendante de lutte contre la corruption, le renforcement des organes de contrôle et la publication transparente des rapports officiels, dans un souci de redevabilité.
Le Sahel à la croisée des chemins
S’agissant de la situation sécuritaire dans la région du Sahel, le président mauritanien a démenti les interprétations selon lesquelles le dernier sommet du Sahel, tenu à Nouakchott, aurait comporté des menaces liées à la crise libyenne.
« Il n’y a eu aucune menace, seulement un appel à une solution rapide. L’instabilité en Libye se répercute sur toute la région du Sahel et du Sahara », a-t-il rappelé.
Il a souligné le rôle que la Mauritanie a joué, sous sa présidence de l’Union africaine, pour promouvoir un règlement politique conduit par les Libyens eux-mêmes et réduire les ingérences étrangères.
Concernant la disparition du G5 Sahel, Ghazouani a reconnu que la structure n’existait plus en tant qu’organisation, mais que l’esprit de coopération régionale restait intact. Il a plaidé pour une coordination accrue face à la montée du terrorisme et averti que seule une action collective permettrait une victoire durable sur la violence.
Enfin, il a estimé que les récents coups d’État militaires dans des pays voisins comme le Niger, le Mali ou le Burkina Faso illustrent les conséquences de la fragilité politique et économique de la région.
« La stabilité et le développement demeurent les meilleures garanties contre le chaos et les transitions non démocratiques », a-t-il conclu.
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