Destruction de Gaza : “Le monde occidental n’aura plus de leçons de droits humains à donner”
La destruction à grande échelle de Gaza et la mort sous les bombes israéliennes de plus de 41 000 Palestiniens, dont une large majorité de civils, se sont accomplies sous le regard passif des principaux pays occidentaux. Une “abdication morale”, selon le chercheur Didier Fassin, qui décrypte dans un récent essai la genèse de “l’acquiescement à l’anéantissement de Gaza”.
La tour Eiffel s’est éteinte pendant quelques minutes, lundi soir, pour commémorer les quelque 1 200 victimes de la série d’attaques terroristes du 7-Octobre en Israël. “Cet attentat ignoble, le premier pogrom du XXIe siècle, a plongé le Proche-Orient dans un chaos où les victimes civiles se comptent en dizaines de milliers”, a indiqué la mairie de Paris, sans préciser que ces dernières étaient en majorité des femmes et des enfants palestiniens tués par l’armée israélienne. En un an de bombardements sur Gaza, les autorités parisiennes n’ont pas utilisé la Dame de Fer pour dénoncer le terrible bilan humain dans l’enclave palestinienne.
L’extrême violence de l’attaque du Hamas, organisation considérée comme terroriste par l’Union européenne et les États-Unis, avait aussitôt provoqué une vague de soutien à Israël. L’intensité des destructions à Gaza et le bilan humain sans précédent des représailles israéliennes ont finalement amené plusieurs dirigeants occidentaux à appeler à un cessez-le-feu. “Je pense qu’aujourd’hui, la priorité, c’est qu’on revienne à une solution politique, qu’on cesse de livrer les armes pour mener les combats sur Gaza“, a déclaré le président français Emmanuel Macron lors de l’émission “Etcetera” sur France Inter, enregistrée le 1er octobre.
Pour Didier Fassin, enseignant à Princeton et professeur au Collège de France, où il est titulaire de la chaire “Questions morales et enjeux politiques dans les sociétés contemporaines”, c’est d’abord le sens moral de l’Occident qui s’est éteint depuis les attaques terroristes du 7-Octobre.
Dans son récent ouvrage “Une étrange défaite – sur le consentement à l’écrasement de Gaza”, le sociologue et anthropologue examine comment de nombreux responsables occidentaux ont accepté “la réalité statistique que les vies de civils palestiniens valent plusieurs centaines de fois moins que les vies de civils israéliens et l’affirmation que la mort des premiers mérite moins d’être honorée que celle des seconds”.